Il était plus difficile pour un nouveau à bord de saisir cette tradition non écrite, non formalisée, établie par les particularités de la vie en bateau et en groupe que, en classe et chez lui d’obéir à la hiérarchie adultes/jeunes habituelle qui souvent régissait sa conduite sans qu’il ait à se donner la peine de prendre de décisions. La relation égalitaire du bord demandait, devant les tâches à assumer, réflexion, compréhension des situations, décisions. Tous à bord s'en trouvaient néanmoins satisfaits, ils étaient venus pour cette forme d'autonomie. 

Quelques uns, une fois adultes, interprétèrent rétrospectivement cette "tradition" comme une pression du groupe ou de l'adulte les contraignant à entrer dans le quotidien du bord. Certains parlèrent même de "moule", peut-être par assimilation à leur vécu scolaire antérieur. 
Certes, une liberté anarchique et individualiste ne pouvait exister dans un tel groupe. Le stage préliminaire était clair sur ce point. Mais en arrivant à bord la vie était si différente de celle de l'écolier qu'elle pouvait être ressentie comme une pression. Pourtant, tout s'expliquait par le bateau même et par les caractéristiques de l'aventure qu'ils avaient choisie en toute connaissance de cause. Aussi se jetaient-ils généralement dans le mouvement même puis, au fur et à mesure qu'ils devenaient plus compétents, avaient tout loisir, dans ce système démocratique, d'orienter cette "tradition" dans un autre sens. C'est précisément ce qui la rendait "évolutive".  Et beaucoup le firent.